Loyauté de la concurrence et économie : une perspective historique
La revue Lamy de la concurrence de novembre 2017 a publié les actes des Entretiens de la Concurrence, colloque organisé le 26 septembre 2017 sur le thème « Loyauté, droit de la concurrence et juge de droit commun ».
En introduction à ce colloque, Laurent Benzoni est intervenu sur le thème « Loyauté de la concurrence et économie : une perspective historique ».
L’économie identifie des catégories comme la concurrence parfaite, imparfaite, oligopolistique, etc. elle qualifie aussi des comportements de maximisation, d’optimisation, voire de « ruse » ou de « tricherie ».
Pour autant, les notions de concurrence loyale ou déloyale n’appartiennent pas vraiment à la sémantique économique. Significativement, ces notions n’apparaissent jamais dans les glossaires des manuels de référence en économie industrielle, en économie de la concurrence, en microéconomie. Ce thème de la concurrence loyale ne ressort pas non plus, en tant que tel, comme un axe majeur de recherche théorique ou empirique de la micro-économie. (…)
La concurrence loyale sur des marchés parfaits, ou presque…
Il est usuel de considérer que la première grande synthèse de la théorie microéconomique se trouve dans l’ouvrage d’Alfred marshall, Principes d’économie politique, publiés en 1890. Deux états opposés du marché sont formalisés : la concurrence pure et parfaite et le monopole pur et parfait.
Concurrence pure et parfaite : la théorie démontre formellement que, sous des hypothèses très restrictives, offreurs et demandeurs, chacun mû par leur seul intérêt individuel, ne peuvent « manipuler » le prix qui s’impose alors à tous sur le marché. Ce prix est concurrentiel, il correspond à l’état du marché où la « main invisible », chère à Adam Smith (1776), a pleinement œuvré. L’état concurrentiel est optimal dans le sens où le surplus de tous, ou surplus collectif, est maximisé compte tenu des contraintes qui pèsent sur chacun (coût pour les offreurs, budget pour les consommateurs). (…)